Péages autoroutiers : la fin des superprofits au service du rail et des routes ?

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La conférence « Ambition France Transports », qui s’est achevée début juillet, a permis au gouvernement et à une cinquantaine d’experts et d’élus de tracer des pistes concrètes pour répondre à une question essentielle : comment financer, dans un contexte budgétaire contraint, la modernisation et la régénération des infrastructures de transport (routes, ferroviaire, fluvial) pour les vingt prochaines années ?

Le président de la Conférence, l’ex-secrétaire d’Etat aux transports Dominique Bussereau, a remis ce mercredi 9 juillet le rapport sur le financement des infrastructures au ministre des Transports, Philippe Tabarot.


x.com/PhilippeTabarot
Péages autoroutiers : une ressource stratégique pour financer la modernisation des transports

Un des leviers les plus prometteurs mis en avant est la manne issue des péages autoroutiers. À partir de 2031, date à laquelle plusieurs concessions arriveront à échéance – le gouvernement a déjà arbitré : les autoroutes demeureront concédées – l’État prévoit de renégocier ces contrats sous un « cadre plus exigeant et mieux contrôlé », comme l’a affirmé Philippe Tabarot, ministre des Transports. L’objectif ? Mettre fin aux « superprofits » des sociétés autoroutières et récupérer environ 2,5 milliards d’euros supplémentaires chaque année, sans augmenter significativement la participation des usagers.
« J’insiste sur ce point : les recettes des transports iront aux transports », a déclaré Philippe Tabarot, le ministre chargé des Transports, dans son allocution du 9 juillet. Ces recettes seront donc directement fléchées vers le financement des transports et non vers le budget général de l’État. C’est un point majeur, car il s’agit de garantir que ces ressources serviront bien à améliorer l’existant plutôt qu’à créer de nouvelles infrastructures coûteuses et parfois contestées. Le ministre a d’ailleurs insisté sur la priorité absolue : régénérer et moderniser les réseaux actuels, notamment le réseau ferroviaire et les routes non concédées, dont l’état de dégradation inquiète fortement les acteurs du secteur.

Un modèle autoroutier repensé

Le nouveau modèle de concessions sera non seulement plus court et géographiquement restreint, mais comportera aussi un pilotage plus strict de l’État et un encadrement renforcé de la rentabilité des sociétés concessionnaires. Cette réforme traduit un refus clair de la gratuité généralisée, jugée incompatible avec les besoins massifs d’investissements estimés à près de 4,5 milliards d’euros par an à partir de 2028.

Outre les péages autoroutiers, le gouvernement compte mobiliser d’autres ressources comme les bénéfices de la SNCF, des capitaux privés et, éventuellement, les certificats d’économie d’énergie. En revanche, certaines idées fiscales proposées, comme une taxe sur les billets TGV ou sur les livraisons de colis, n’ont pas été retenues.

Priorité à la régénération et non aux grands projets

Le gouvernement souhaite également éviter la multiplication de grands projets parfois décidés sous la pression locale, au détriment de l’entretien quotidien des infrastructures. Le Conseil d’orientation des infrastructures (COI) sera chargé, d’ici 2026, d’établir une hiérarchie claire des priorités, en fonction de l’opportunité, du coût et de la maturité des projets.

Un premier projet de loi, prévu d’ici fin 2025, viendra inscrire dans le marbre ces nouvelles orientations. Un second texte, attendu pour 2026, précisera les projets retenus et leur financement.

Un enjeu majeur pour la transition écologique et sociale

La question du financement des infrastructures dépasse le seul cadre technique : elle touche directement à l’égalité territoriale et à la transition écologique. Rénover le réseau ferré, moderniser les routes existantes et développer les services express régionaux métropolitains, c’est faciliter l’accès de tous à des mobilités plus durables et plus fiables, tout en limitant le développement de nouvelles autoroutes très contestées comme l’A69.

Au final, l’enjeu est clair : faire des péages autoroutiers et d’autres ressources existantes des leviers pour financer, non pas de nouveaux projets tape-à-l’œil, mais la régénération de réseaux vieillissants, trop longtemps négligés. Une orientation qui, si elle est respectée dans les faits, pourrait contribuer à rendre nos transports plus performants, plus sûrs et plus respectueux de l’environnement.

Position CFDT : 

La CFDT salue ces décisions, qui correspondent à plusieurs des propositions qu’elle a soutenues via un cahier d’acteur déposé sur la plateforme de la conférence. Mais elle déplore n’avoir pas été associée à cette conférence (comme les autres organisations syndicales, d’ailleurs) – hormis une courte audition, convoquée dans l’urgence, de ces dernières. C’est pourquoi la CFDT a écrit au Premier ministre et au ministre chargé des Transports dès la remise de ce rapport, regrettant que la dimension sociale ait été « largement occultée » lors de cette conférence, alors que certains métiers de la logistique souffrent d’un manque d’attractivité. « Les salariés des transports seront directement concernés par de nouveaux modes de production ou par des enjeux de transition », expliquent, dans un communiqué commun, la Confédération et la CFDT Transports et Environnement, laquelle demande d’être associée désormais aux décisions et réclame la mise en place d’une « gouvernance de la politique nationale des transports ouverte à toutes les parties prenantes »

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A télécharger :

Le rapport Ambition France Transports

Le communiqué de presse (09-07-25)

Synthèse des propositions (14) faites par la conférence

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