Discrimination à l’embauche, âge et origine : les résultats du programme de testing dans la fonction publique

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Malgré un affichage volontariste, la fonction publique n’échappe pas aux biais à l’embauche. Les résultats du programme de testing DESPERADO  V, présentés en CCFP-F3S le 10 juillet, révèlent des discriminations persistantes, notamment liées à l’origine et à l’âge. Ce bilan, issu de 3 375 candidatures fictives envoyées dans les trois versants de la fonction publique, interroge l’efficacité des politiques d’égalité et appelle à poursuivre la formation des jurys, l’objectivation des recrutements et le dialogue social.

Lors de la session FS3 du 10 juillet du Conseil commun de la fonction publique (CCFP), la DGAFP a dévoilé les conclusions du rapport DESPERADO V – un programme de testing unique lancé il y a dix ans pour prendre le pouls des discriminations à l’embauche dans les trois versants de la fonction publique et les comparer au secteur privé.

Entre novembre 2023 et mars 2024, 675 offres ont été testées (dont 267 dans des administrations ou établissements publics) grâce à 3 375 candidatures fictives. Deux familles de métiers très féminisés ou masculinisés ont été passées au crible : cadres administratifs (cat. A) et aides‑soignantes (cat. C) .

Ce que disent les chiffres côté fonction publique

Les deux profils les plus défavorisés sont ceux des candidats qui signalent une origine maghrébine par leur patronyme et dans une moindre mesure ceux des candidats qui signalent un âge de plus de 50 ans dans leur CV et leur lettre de motivation.

  1. Pour un candidat dont l’origine maghrébine est suggérée par la consonance du nom et du prénom, la pénalité varie de 3 à 12,1 points selon les profils des candidats et les secteurs d’activité. Elle atteint en moyenne 6,3 points pour les cadres administratifs et 9,3 points pour les aides-soignantes. En termes relatifs, les écarts sont respectivement de 30,8% et de 26,7% de chances de succès en moins relativement au candidat de référence.
  2. Pour un sénior, la pénalité subie relativement au candidat de référence va de 3 à 5,4 points de pourcentage selon les profils. Elle est en moyenne de 4,6 points pour les cadres administratifs et de 3,7 points pour les aides-soignantes, ce qui correspond à des pénalités relatives de 22,3 % et 10,6 %. La pénalisation des seniors existe dans la fonction publique tout autant que dans le secteur privé, pour les cadres administratifs comme pour les aides-soignants.

Ces résultats situent le critère de l’âge comme l’un des plus pénalisants sur le marché du travail français, avec l’origine et une situation de handicap.

En quoi ces résultats sont cruciaux ?

La fonction publique affiche globalement des taux de même ordre de grandeur que dans le privé, mais les écarts liés à l’origine et, dans une moindre mesure, à l’âge perdurent. Ces résultats confirment l’urgence :

  1. d’outiller les services RH publics pour objectiver les décisions de recrutement,
  2. de former les jurys aux biais implicites, notamment sur l’âgisme,
  3. de donner toute sa place au dialogue social,
  4. de poursuivre l’évaluation régulière des pratiques, afin de mesurer l’efficacité des plans égalité et des dispositifs type « emplois francs »,
  5. de muscler cette étude pour l’édition 2026 en embarquant d’autres problématiques émergentes et/ou facteurs de discrimination, notamment l’introduction des outils algorithmiques utilisant de l’IA ou encore la discrimination syndicale.
Pour aller plus loin :
  1. Guide CFDT « Ensemble contre les discriminations » – modes d’action & leviers juridiques
  2. Enquête « Les Français et l’âgisme » – décryptage des stéréotypes d’âge au travail (sur site CFDT-Retraités)

Ces ressources complètent les enseignements du rapport DESPERADO V et alimentent la réflexion de l’UFFA-CFDT pour des parcours professionnels réellement équitables.

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D’après l’article initialement publié par L’UFFA-CFDT
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