Plan d’économies : la CFDT dénonce 10 milliards d’économies arbitraires, dangereuses et sans partage de l’effort

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Communiqué de presse CFDT du 23 février 2024 :

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Dimanche 18 février, Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, a annoncé un plan d’économies de dix milliards, justifié par des prévisions de croissance initialement trop optimistes.

Quatre jours plus tard, le Journal officiel confirme et détaille les coupes budgétaires. À peine deux mois après le vote de la loi de finances pour 2024, cette décision est prise par décret, sans débat, ni sur la méthode, ni sur le fond ! 

La CFDT dénonce à la fois l’absence de débat démocratique, la brutalité des montants exigés, et l’absence de justice sociale. Quelle contradiction insolente entre les incantations affichées et l’asphyxie de certaines politiques publiques, notamment de l’emploi et de la formation !

Comment peut-on à la fois prétendre faire du plein emploi, de l’éducation, de l’enseignement supérieur et de la recherche, de la transition écologique ou du logement, des priorités, et massivement obliger la mise à l’arrêt de toutes les politiques d’accompagnement et de transformation ? Les efforts demandés par exemple au ministère du Travail (1,1 milliard sur 15 milliards de budget) sont intenables au moment du lancement de France Travail, sauf à mettre à bas tous les investissements dans les compétences et l’emploi, et ce, pour longtemps.

La CFDT a toujours eu le souci de la dépense publique, des déficits budgétaires, de la dette, et de leurs conséquences sur les générations futures. Mais pour la CFDT, les niveaux d’impacts attendus sur les politiques publiques les plus touchées sont d’une gravité telle qu’ils compromettent l’avenir et les transformations indispensables.

Décision après décision, les ressorts sont toujours les mêmes : en s’entêtant dans son choix dogmatique de tailler dans les dépenses sans s’intéresser aux recettes, en refusant d’ouvrir le chantier de la fiscalité, le Gouvernement concentre toujours l’effort sur les plus modestes. Il persiste à ne pas conditionner les financements très importants consacrés aux entreprises alors même que leur efficacité est plus que contestée. Il refuse de faire évoluer la fiscalité des plus hauts revenus. Il rejette tout partage des efforts.

Pour la CFDT, la question d’un effort solidaire de ces revenus pour investir sur le long terme, notamment dans la transformation écologique, doit être enfin posée.

Les mesures de réduction de la masse salariale pour la Fonction publique, en période d’inflation, sont un nouveau coup aux agentes et agents de la Fonction publique, qu’on applaudissait hier. Les politiques publiques aussi sensibles que celles qui sont visées, tout comme les agents des ministères chargés de les mettre en œuvre, ne peuvent être les variables d’ajustement d’un dogme de la baisse d’impôt. 

La CFDT appelle le Gouvernement à reconsidérer urgemment la méthode employée, à financer à la hauteur des besoins les politiques prioritaires d’un véritable projet d’avenir pour la France, et à les financer par une politique fiscale socialement juste et progressive.

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Télécharger le communique de presse CFDT du 23-02-24

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Le détail des suppressions :

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L’écologie, le développement et la mobilité durables sont les plus touchés

Selon le gouvernement, ces 10 milliards d’euros d’économies sont pour moitié ciblés sur certaines politiques publiques et pour moitié répartis sur l’ensemble des ministères (Voir détails ICI).

Les opérateurs de l’État, les dépenses de fonctionnement et les dépenses immobilières sont mis à contribution.

La mission la plus touchée par l’annulation de crédits est « Écologie, développement et mobilité durables » avec une annulation de 2,13 milliards d’euros. L’annulation de 950 millions d’euros sur le programme 174 concerne directement des dispositifs d’aide aux ménages destinés à les accompagner dans la transition énergétique : MaPrimeRénov’, chèque énergie, aides à l’acquisition de véhicules propres. Le« Fonds vert » (le fonds d’accélération de la transition écologique dans les territoires) perd, pour sa part, plus de 400 millions d’euros

L’annulation de 736 millions d’euros sur la mission « Cohésion des territoires » touche des politiques publiques comme l’aide à l’accès au logement (-300 millions d’euros) ou l’urbanisme, les territoires et l’amélioration de l’habitat (-358 millions d’euros).

Notons aussi moins 20 millions pour la mission « Contrôle et exploitation aériens ».

Pour le budget du ministère de l’Intérieur et de l’Outre-Mer, les coupes budgétaires se déclinent entre 232 millions d’euros pour la mission « Sécurités », 174 millions pour la mission « Immigration, asile et intégration », 170 millions pour la mission « Administration générale et territoriale de l’État » et enfin 78 millions pour la mission « Outre-Mer »

La mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » perd 70 millions de crédits.

La mission « Santé » se voit aussi annulés 70 millions d’euros, répartis sur les programmes « Protection maladie » et « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins ».

Le budget « Transformation et fonction publiques » se voit amputé de 94 millions d’euros de crédits. 12 millions d’euros pour le programme « Fonction publique », 10 millions pour la mission « Transformation publique », 29 millions pour la mission « Innovation et transformation numériques » et, près de 43 millions pour la mission « performance et résilience des bâtiments de l’État et de ses opérateurs »

Coupe dans la masse salariale de l’État

Sur les dépenses de personnel relevant du titre 2 du budget, c’est 780 millions d’euros d’économies qui sont faites (Voir détails ICI), alors que le 19 février, il avait été annoncé 700 millions d’euros d’économies sur la « masse salariale de l’État ». 

Dans des ministères, certaines mesures spécifiques ou catégorielles liées à la rémunération pourraient ne pas être mises en place.

Il est annoncé un décalage des recrutements programmés. Bercy se voudrait rassurant : « En aucun cas, il n’y a de suppressions d’emplois pour les ministères, et a fortiori pour l’Éducation nationale« .
Pourtant, selon François Ecalle, fondateur du site FIPECO et ancien rapporteur général du rapport de la Cour des comptes sur la situation et les perspectives des finances publiques, 700 millions d’euros d’économies sur la masse salariale de l’État, « c’est le coût d’environ 20 000 recrutements en année pleine« .
Le projet de loi de finances pour 2024, pour rappel, prévoyait un peu plus de 8 000 créations nettes d’emplois dans la fonction publique d’État. « Mais cela veut aussi dire plus de 60 000 recrutements pour compenser les départs à la retraite« , indique-t-il.
Surtout, ajoute François Ecalle, les problèmes de recrutement « sont tels » à l’État que « les créations nettes d’emplois ont été inférieures aux autorisations des budgets ces dernières années« . A ses yeux, pour trouver 700 millions d’euros d’économies dans les dépenses de personnel, « il va falloir ouvrir beaucoup moins de postes que prévu en début d’année » et, si l’État y parvient, « il y aura moins d’emplois en 2024 qu’en 2023« . « C’est possible mais sans doute techniquement compliqué car les schémas d’emplois ont en principe été validés en janvier et le gel sur le titre II du budget (celui relatif aux dépenses de personnel) est limité à 0,5% des crédits des ministères« , estime l’ancien rapporteur général du rapport de la Cour des comptes.

Bonjour les contradictions !

Dans beaucoup de domaines, ces coupes budgétaires sont en contradiction totale avec les objectifs affichés, il y a peu, par le gouvernement !

Les autorisations d’engagement consacrées à la prévention des risques (1,3 milliard d’euros) vont diminuer de 4,4%, soit 57 millions d’euros, et ce alors que la France vient de connaître des catastrophes naturelles d’ampleur.

La politique du logement, pourtant encore récemment affichée comme une priorité gouvernementale, continue d’être affaiblie par la réduction des crédits dédiés à la rénovation énergétique du logement, à la lutte contre l’habitat indigne et à l’accession sociale à la propriété.

Idem pour l’Éducation Nationale, une des soi-disant premières priorités du 1er ministre Gabriel Attal : résultats … les missions « Enseignement scolaire » et « Recherche et enseignement supérieur » connaissent respectivement des annulations de 691 millions d’euros et de 904 millions d’euros. Si les enseignements publics des premier et second degrés cumulent l’annulation de 261 millions d’euros, l’enseignement privé perd 98 millions d’euros. C’est prioritaire, en effet !

Le « réarmement« , dernier mantra, en date, du président Macron, débute plutôt mal avec des services publics qui vont se retrouver complètement « désarmés » !!!

Encore plus de raisons pour une importante mobilisation le 19 mars !

Pour mémoire, toutes les organisations syndicales appellent à une journée de manifestations et de grève pour le 19 mars 2024. Soyons présents !

UFETAM – La Défense, le 24 février 2024

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