Élections Fonctions publiques : des précisions sur le déroulement du scrutin

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Élections Professionnelles Fonctions publiques : des précisions sur le déroulement du scrutin (23-11-18)

La CFDT a interrogé la DGAFP sur l’existence de dates limites :

  • de diffusion d’informations syndicales aux agents par courriel ou tractage
  • d’organisation de réunions (HMI) ou de visites de sites.

Vous trouverez ci-dessous les réponses de la DGAFP.

En outre vous trouverez un arrêt de la Cour de cassation sur l’annulation d’élections lorsqu’un salarié confie ses clés de vote électronique à un collègue pour voter à sa place.

Dates limites de diffusion d’informations syndicales aux agents par courriel ou tractage

DGAFP. Au sein de la FPT, l’article 21-4 du décret CT et l’article 17-1 du décret CAP prévoient que « La distribution de documents de propagande électorale ainsi que leur diffusion sont interdites le jour du scrutin ». Pour ce qui concerne la FPE et la FPH, les textes ne réglementent pas expressément la propagande électorale.

Cependant, il a été rappelé aux organisations syndicales que dès l’heure d’ouverture du premier jour du scrutin, la communication faite par les syndicats ne doit, conformément au principe général du droit électoral reconnu par le juge, pas porter atteinte à la « sincérité du scrutin ». En effet, le principe de sincérité du scrutin est défini par le Conseil constitutionnel comme « le révélateur de la volonté réelle de l’électeur ». Dès lors que celle-ci ne peut pas être connue de manière certaine, et donc qu’il est impossible de connaître avec certitude le choix majoritaire des électeurs, l’élection est annulée par le juge de l’élection (cf. CE, Ass., 5 nov. 2004, n° 252102 pour une application du principe de sincérité aux élections professionnelles dans la fonction publique).

Des informations syndicales peuvent être diffusées par les organisations syndicales durant la campagne électorale, mais il ne doit pas être porté atteinte à la sincérité du scrutin dès lors qu’il est ouvert, c’est-à-dire pendant la période de vote. Ces informations pourront être diffusées sur support papier et par voie électronique en respectant les arrêtés ou décisions d’utilisation des TIC par les organisations syndicales en vigueur dans les administrations.

Au sujet des informations communiquées par voie électronique, l’arrêté du 4 novembre 2014 relatif aux conditions générales d’utilisation par les organisations syndicales des technologies de l’information et de la communication dans la fonction publique de l’État prévoit que : « À compter de la date de clôture du dépôt des candidatures et au plus tard un mois avant le jour du scrutin organisé pour le renouvellement d’une instance représentative du personnel, et jusqu’à la veille du scrutin, toute organisation syndicale dont la candidature a été reconnue recevable à l’élection considérée a accès, dans les services ou groupes de services concernés par le scrutin, aux mêmes technologies et dans les mêmes conditions. »

Ici, il est clairement indiqué une utilisation par les organisations syndicales des technologies de l’information et de la communication jusqu’à la veille du scrutin.

L’absence totale de propagande/communication, surtout lorsqu’elle est écrite, constitue une solution de prudence pour les organisations syndicales elles-mêmes (le juge n’aura pas à s’interroger sur les effets d’une information diffusée aux agents, puisqu’il n’y en aura pas eu), afin de respecter le principe de sincérité du vote.

Dates limites d’organisation de réunions (HMI) ou de visites de sites

DGAFP. C’est le décret n°82-447 du 28 mai 1982 relatif à l’exercice du droit syndical dans la fonction publique qui s’applique dans la FPE. Les HMI sont prévues à l’article 5 – I. qui prévoit que :

« Les organisations syndicales représentatives sont en outre autorisées à tenir, pendant les heures de service, des réunions mensuelles d’information. [..] Chacun des membres du personnel a le droit de participer à l’une de ces réunions, dans la limite d’une heure par mois (…)».

Plus spécifiquement en période électorale, l’article 5 – II. prévoit que « Sans préjudice des dispositions du I, pendant la période de six semaines précédant le jour du scrutin organisé pour le renouvellement d’une ou plusieurs instances de concertation, chacun des membres du personnel peut assister à une réunion d’information spéciale, dont la durée ne peut excéder une heure par agent. Cette réunion spéciale peut être organisée par toute organisation syndicale candidate à l’élection considérée ».

Par ailleurs, la circulaire d’application n° SE1 2014-2 du 3 juillet 2014 relative à l’exercice du droit syndical dans la fonction publique de l’État précise que : « Les réunions syndicales […] ne doivent pas porter atteinte au bon fonctionnement du service … ».

Dans la FPT et la FPH, les articles 6 des décrets n°85-397 du 3 avril 1985 relatif à l’exercice du droit syndical dans la fonction publique territoriale et n°86-660 du 19 mars 1986 relatif à l’exercice du droit syndical dans la fonction publique hospitalière prévoient comme dans la FPE, une HMI ainsi qu’une réunion spéciale d’information en période électorale pendant la période de six semaines précédant le jour du scrutin (alinéa 3 des deux décrets).

Il est donc recommandé d’avoir recours à la HMI ainsi qu’à la réunion d’information spéciale en période électorale jusqu’à la veille du scrutin, dans le respect de l’esprit des textes.

L’administration a une marge d’appréciation quant à l’organisation de ces réunions d’information, même si elles doivent par principe être accordées tant que le bon fonctionnement du service n’est pas remis en cause. Ces HMI ne doivent avoir pour effet ni de porter atteinte au bon fonctionnement du service, ni d’influencer le vote des électeurs pendant la période de vote et de porter atteinte à la sincérité du scrutin. En effet, la propagande abusive sera sanctionnée par l’annulation des élections si elle a été de nature à fausser les résultats du scrutin (Cass. soc., 1er déc. 1993, no 93-60.029).

Confier ses clés de vote électronique à un tiers afin qu’il vote à sa place justifie l’annulation des élections (Cour de cassation)

Justifie l’annulation des élections professionnelles, le fait pour des salariés de confier leurs clés de vote électronique à un collègue qui vote en leur lieu et place, peu importe qu’aucune fraude ne soit établie et que l’irrégularité n’ait pas faussé les résultats du scrutin. Ce vote pour autrui est en effet contraire au principe général du droit électoral qu’est l’exercice personnel du droit de vote. C’est ce que retient la Cour de cassation dans un arrêt publié du 3 octobre 2018.

Un salarié qui parle mal français et qui n’a pas l’habitude d’utiliser un ordinateur peut-il, pour voter aux élections professionnelles par voie électronique, confier sa clé de vote à un collègue ? Non, l’exercice personnel du droit de vote est un principe général du droit électoral, rappelle la Cour de cassation le 3 octobre 2018.

Dans cette affaire, la société Flunch saisit le tribunal d’instance pour obtenir l’annulation des élections professionnelles organisées au sein de son établissement de Villabé, en application d’un protocole d’accord préélectoral prévoyant le recours au vote électronique.

La société invoque le fait que deux salariées ont confié à une troisième, candidate CGT aux élections professionnelles, le code confidentiel leur permettant de voter, et qu’elle a voté à leur place. Les deux salariées ne maîtrisaient pas l’outil informatique et l’une d’elles ne parlait pas bien français. La candidate affirme qu’elle a été sollicitée par ses collègues qui demandaient de l’aide, et précise qu’elle a voté selon leurs indications.

Le tribunal refuse d’annuler les élections. Il retient que les salariées, « bien que dûment informées du caractère personnel, confidentiel du vote, ne pouvant être confié à un tiers », ont « en toute connaissance de cause confié leur clé de vote à une troisième pour qu’elle vote pour elles ». La fraude « n’est donc pas établie », et « en toute hypothèse, l’irrégularité relevée n’est pas de nature à fausser les résultats », conclut le tribunal.

Telle n’est pas l’analyse de la Cour de cassation. Les hauts magistrats énoncent que « le recours au vote électronique pour les élections professionnelles, subordonné à la conclusion d’un accord collectif garantissant le secret du vote, ne permet pas de déroger aux principes généraux du droit électoral ». Ils ajoutent que « l’exercice personnel du droit de vote constitue un principe général du droit électoral auquel seul le législateur peut déroger ». L’affaire est renvoyée devant un autre tribunal d’instance pour être réexaminée.

L’arrêt Cass. soc., 3 octobre 2018, n°17-29.022 est en PJ.