Groupe de travail du 01-12-20 : reconnaissance des pathologies liées à une infection au Covid-19

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Ce groupe de travail avait pour objet l’examen du projet de circulaire relative à la reconnaissance des pathologies liées à une infection au SARS-CoV2 (coronavirus) dans la fonction publique de l’État (FPE), dans le cadre du décret du 14 septembre 2020.

L’administration présente les principes de cette circulaire, qui reprend pour la FPE les recommandations du groupe d’expert présidé par le professeur FRIMAT pour l’application du décret 2020-1131 du 14 septembre 2020 relatif à la reconnaissance du SARS-CoV2 en maladie professionnelle.

Le professeur FRIMAT, professeur émérite en médecine du travail et président de la commission spécialisée en santé au travail du Conseil d’orientation des conditions de travail (COCT) est invité à ce groupe de travail. Il rappelle le contexte et le contenu de ces recommandations :

  • Le décret du 14 septembre prévoit la création d’un tableau n°100 « infections respiratoires aigües liées au SARS-CoV2 » annexé au livre IV du code de la sécurité sociale, et il prévoit également une procédure aménagée d’instruction des demandes de reconnaissance, qui seront confiées pour le secteur privé à un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) unique, dédié aux maladies liées au Covid-19, afin d’en harmoniser le traitement.
  • La direction générale du travail (DGT) et la direction de la sécurité sociale (DSS) ont confié au professeur FRIMAT la mise en place un comité d’experts ayant pour mission d’élaborer un guide à l’usage de ce CRRMP pour la reconnaissance au titre de la voie complémentaire, c’est-à-dire pour les personnels ne remplissant pas les conditions du tableau 100.
  • L’idée de ce guide est d’homogénéiser la prise en charge de la reconnaissance, en établissant des critères les plus pragmatiques et scientifiques possibles, avec trois faisceaux d’arguments pour établir le lien direct de causalité : le présentiel (sur le lieu de travail ou pas), la temporalité (avant, pendant ou après confinement), et histoire clinique de l’agent.

Le professeur FRIMAT rappelle également que le taux d’incapacité permanente partielle (IPP)° de 25 % utilisé pour la reconnaissance en maladie professionnelle est le taux prévisible et non le taux réel qui sera atteint quand la maladie sera consolidée.

L’administration précise que le champ d’application de la circulaire est la Fonction publique de l’État, mais que ses principes s’appliqueront à l’ensemble de la fonction publique et seront déclinés dans des circulaires à venir pour la FPT et la FPH. Les contractuels seront pris en charge par le CRRMP.

Dans la FPE, il existera un parallélisme avec le CRRMP puisque la compétence de la Commission de réforme sera systématiquement élevée au niveau ministériel, ce qui participera de l’égalité de traitement entre les agents. Cela améliorera aussi la durée de traitement des dossiers par une mobilisation centralisée de l’expertise. La direction générale de l’administration et de la Fonction publique (DGAFP) s’engage à communiquer régulièrement les statistiques de traitement de ces dossiers pour la FPE, le comparatif avec le secteur privé étant rendu possible grâce au parallélisme des instances. La direction générale des collectivités locales (DGCL) pour la Fonction publique territoriale (FPT) et la direction générale de l’offre de soin (DGOS) pour la Fonction publique hospitalière (FPH) précisent que la centralisation de la commission de réforme au niveau national n’est pas possible dans leur versant.

La CFDT accueille favorablement le principe d’une doctrine claire et d’un traitement homogène, et rappelle que ce n’est pas la circulaire présentée aujourd’hui ou les recommandations bienveillantes du professeur FRIMAT qui posent problème, mais bien le décret lui-même, qui reste inacceptable.

Elle rappelle également que la confédération CFDT, la CFDT Fonctions publiques et l’ensemble des fédérations professionnelles de la CFDT se sont associées à la fédération Santé-Sociaux pour contester ce décret auprès du conseil d’état et demandent à nouveau et instamment au gouvernement de revoir ce dispositif.

La CFDT s’interroge sur la temporalité de la circulaire, qui ne prend en considération que trois périodes (avant le 17 mars 2020 ; du 17 mars au 10 mai et après le 11 mai alors que de toute évidence le Covid 19 est en circulation depuis au moins janvier 2020, et n’a pas cessé de circuler et d’être actif puisque l’état d’urgence sanitaire est de nouveau en vigueur jusqu’au 16 février 2021. Elle trouverait opportun d’anticiper d’ores et déjà des dispositions qui permettent d’inclure les victimes de la deuxième vague, voire de la troisième ou plus, puisqu’on sait déjà qu’il y en aura.

La CFDT pose également des questions sur la circulaire : 

  • Quid de la prise en compte des possibles contaminations pendant le trajet pour aller travailler ? Pas de prise en compte comme critères éventuels de l’utilisation des moyens de transports (métro, bus, train) en communs qui sont pourtant « un nid à microbes ».
  • Pourquoi pas de reconnaissance du Covid en accident de travail (AT) ? La prise en charge en maladie professionnelle ne doit se faire que si l’AT n’a pas été pris en charge. Si l’agent a eu les symptômes au temps et au lieu du travail, et qu’il déclare un AT, cela doit être inscrit comme tel.
  • La commission de réforme (CR) n’émet qu’un avis qui ne s’impose pas à l’employeur contrairement à la CRMP. Quel poids aura cette CR. ?

Réponses de l’administration

La temporalité n’est qu’un élément parmi d’autres et c’est bien à la commission de réforme de juger de l’imputabilité, y compris au vu d’autres éléments.

La circulaire est une application du décret, qui a fait le choix de la reconnaissance en maladie professionnelle et pas en accident de travail. Les dossiers déjà traités sont créateurs de droit et la circulaire ne remet pas en cause les décisions favorables à l’agent.

Le régime assurantiel de la fonction publique et du secteur privé ne sont pas les mêmes et il n’existe pas de système d’ATMP dans la fonction publique. La CRMP et la commission de réforme n’ont de ce fait, pas les mêmes compétences.

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Sur le même sujet :

Quelles conditions pour que le Covid soit reconnu comme maladie professionnelle ? ( Acteurs Publics – 30-11-20)

Acteurs publics s’est procuré un projet de circulaire où le ministère de Transformation et de la Fonction publiques détaille la doctrine que devront appliquer les commissions ad hoc lorsqu’elles seront saisies par des fonctionnaires de demandes de reconnaissance du Covid-19 comme maladie professionnelle.

Les discussions reprennent dans la fonction publique sur les modalités de reconnaissance du Covid-19 comme maladie professionnelle. Ces conditions seront en effet à l’ordre du jour d’un nouveau groupe de travail organisé par la Direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) ce mardi 1er décembre. Un échange au cours duquel sera présenté un projet de circulaire du ministère de la Transformation et de la fonction publiques sur le sujet, document qu’Acteurs publics a pu consulter [cliquez ici pour le consulter].

Lors d’un premier groupe de travail organisé fin septembre, la DGAFP avait déjà donné des premières indications sur ces modalités de reconnaissance pour les fonctionnaires. A cette occasion, la direction générale avait précisé les modalités d’application aux fonctionnaires du décret du 14 septembre dernier qui reconnaissait le statut de maladie professionnelle notamment aux personnels de santé qui avaient développé une forme grave de Covid-19 ayant nécessité un apport d’oxygène ou ayant entraîné le décès. Condition supplémentaire : avoir fait l’objet d’une prise en charge médicale dans un délai maximal de 14 jours à compter de la fin de l’exposition au risque [cliquez ici pour consulter notre article sur le sujet].

Rôle des commissions de réforme

Conformément à ce texte, ce statut pouvait aussi être reconnu aux personnes ne travaillant pas dans le secteur de la santé. Et ce après que leur situation aura été examinée par un comité d’experts appelé “comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles” (pour les salariés du secteur privé, les praticiens hospitaliers et des agents contractuels de droit public) ou par des “commissions de réforme” (pour les fonctionnaires) qui émettront un avis consultatif (avant décision de l’administration) sur l’opportunité de la reconnaissance ou non du Covid-19 comme maladie professionnelle.

Le projet de circulaire du ministère détaille précisément la conduite que ces commissions de réforme de la fonction publique devront tenir en cas de saisines. Le tout par transposition des recommandations qui viennent d’être adressées par le gouvernement aux comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles.

Lien direct avec les fonctions à établir

Ce projet de document revient ainsi premièrement sur les saisines de fonctionnaires dont la pathologie liée au Covid-19 est considérée comme grave mais dont les autres critères de reconnaissance ne sont pas remplis (délai de prise en charge et travaux listés dans le décret du 14 septembre).

Dans chacune de ces deux dernières situations, la commission de réforme “devra indiquer, bien que les conditions de la reconnaissance par présomption ne soient pas réunies, si un lien direct peut être établi entre l’affection (forme grave respiratoire de Covid-19) et l’exercice des fonctions de la victime”, explique le projet de circulaire en détaillant les critères qui pourraient être pris en compte pour une reconnaissance en maladie professionnelle.

Pour la période antérieure au 17 mars (avant le premier confinement) et pour la période du 17 mars au 11 mai (la période de confinement donc), c’est la “conjonction de trois faisceaux d’arguments, dont le poids respectif sera apprécié dans chaque situation individuelle, qui permettra à la commission de réforme d’établir un lien direct entre l’affection et le travail”. A savoir une “activité effective en présentiel entrainant des contacts avec le public ou des collègues”, des critères de temporalité donc et une “histoire clinique en faveur d’un contage professionnel (la cause matérielle de la propagation, ndlr)”.

Pour la période postérieure 11 mai, depuis le premier déconfinement donc, ce sera l’histoire clinique qui sera “particulièrement pris en compte dans l’examen effectué par les commissions de réforme”.

Pas de reconnaissance d’imputabilité au service

Deuxième cas de figure sur lequel revient le projet de circulaire : les saisines de fonctionnaires qui déclarent une maladie liée au Covid-19 mais qui ne correspond pas à la désignation du décret du 14 septembre, à savoir une forme grave. Il peut ainsi s’agir de formes non respiratoires de la maladie ou de formes associant des atteintes respiratoires et non respiratoires “suffisamment graves pour justifier une incapacité permanente d’au moins 25%”. Dans cette situation, la commission de réforme “devra indiquer qu’il existe un lien direct et essentiel entre l’affection constatée et le travail effectué par la victime”.

Un “point de vigilance” figure également dans le projet de circulaire sur les demandes de reconnaissances des pathologies liées au Covid-19 présentées au titre d’accident de service. “L’accident de service se différencie de la maladie professionnelle par sa soudaineté, explique le ministère. Alors que le premier constitue un événement survenu à date certaine, inversement, la survenance d’une maladie professionnelle n’est, elle, pas rattachable à une date certaine et résulte davantage d’une exposition prolongée à un risque pour la santé”.

Le gouvernement précise ainsi que la contamination “ne pouvant être isolée avec certitude, ni datée avec précision, la caractérisation d’un fait accidentel précis survenu au travail et ayant causé l’infection est impossible en pratique”.

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