“Difficile de dire si les fonctionnaires seront les gagnants ou les perdants de la réforme des retraites”

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Christian Carrega : “Difficile de dire si les fonctionnaires seront les gagnants ou les perdants de la réforme des retraites” (Acteurs Publics – 25-06-19)

Directeur général de la Préfon, régime retraite complémentaire des agents publics, Christian Carrega revient sur les impacts potentiels pour la fonction publique de la réforme à venir des retraites. “Le diable risque de se trouver dans les détails pour les agents publics”, prévient-il. 

L’article d’Acteurs Publics :

Directeur général de la Préfon, régime retraite complémentaire des agents publics, Christian Carrega revient sur les impacts potentiels pour la fonction publique de la réforme à venir des retraites. “Le diable risque de se trouver dans les détails pour les agents publics”, prévient-il.

Les agents publics bénéficieront-ils positivement de la réforme des retraites ou non ? 
Difficile de dire, pour le moment, si les fonctionnaires seront les gagnants ou les perdants de la réforme. Le diable risque de se trouver dans les détails pour les agents publics. Le sujet majeur de cette réforme pour ces derniers sera certainement la prise en compte des primes dans le calcul des retraites. Mais plusieurs problématiques se posent à ce propos. Ceux qui en ont beaucoup vont-ils en bénéficier ou bien vont-ils perdre du pouvoir d’achat en termes de cotisations ? Et ceux qui n’ont pas beaucoup de primes, voire pas du tout, va-t-on les considérer comme les grands perdants de la réforme ? Nous n’en savons rien. Des réponses doivent être rapidement apportées par les pouvoirs publics.

Est-il nécessaire d’adapter la politique salariale pour certains agents publics qui n’ont, par exemple, pas beaucoup de primes ?
Oui, la revalorisation pour ces agents est importante. Il ne faut pas oublier l’histoire sociale française et l’origine du mode de calcul des retraites des fonctionnaires. Dès ses origines, il a été accepté que les fonctionnaires soient un peu moins payés que dans le privé et ce afin que leur retraite soit une continuation de leur activité. Il s’agit d’une continuité de leurs missions de service public. Aujourd’hui, cette logique de pacte social doit être refondée.

Certaines idées reçues à propos du régime de retraite du secteur public devront aussi être combattues…
Et il y en a beaucoup. Plusieurs récents rapports ont par exemple montré que si l’on appliquait aux retraités du public les règles de calcul du privé, au global, rien ne dit que les fonctionnaires seraient globalement perdants. Par ailleurs, lorsque l’on regarde ce que dit le Conseil d’orientation des retraites (COR), on voit bien que les taux de remplacement [le rapport entre le montant de la retraite et celui du dernier revenu d’activité perçu, ndlr] commencent à être proches entre le secteur public et le privé. Bien sûr, c’est moins vrai pour les enseignants, notamment, qui n’ont pas beaucoup de primes, à la différence des cadres, qui en ont beaucoup. Ce système reste toujours perçu comme inégalitaire. Je parle bien de perception, car il n’est pas si inégalitaire que ça.

Observez-vous de l’inquiétude de la part des agents publics quant à l’avenir de leurs retraites ?
Elle est particulièrement palpable. Nous lançons d’ailleurs une Web TV le 27 juin pour améliorer le niveau d’information. Nombre d’agents qui viennent vers nous ne savent pas à quelle sauce ils vont être mangés et sont inquiets pour leur pouvoir d’achat. Ils nous disent globalement qu’il y a un véritable besoin d’épargne en vue de leurs retraites. Cette inquiétude se matérialise par l’augmentation du nombre de nos adhérents et notamment de catégorie C. Mais les agents publics n’ont pas suffisamment de moyens pour cotiser à une épargne retraite. Ce sujet est notamment lié au gel de la valeur du point d’indice. Nous avons récemment plaidé auprès des parlementaires pour intégrer dans la réforme un volet “épargne” puisque, quoi que l’on dise, le taux de remplacement ne va pas augmenter dans les prochaines années. La réforme à venir a vocation à donner plus de visibilité et d’équité, mais elle ne contribuera pas à de meilleurs niveaux de retraites en 2025 qu’aujourd’hui. Dans le privé, beaucoup de dispositifs existent pour aider les salariés à avoir une épargne retraite. Pourquoi donc l’État, en tant qu’employeur, ne s’imposerait-il pas à lui-même ce qu’il impose au secteur privé ?

Propos recueillis par Bastien Scordia