Négociation collective : la CFDT Fonctions publiques alerte Olivier Dussopt sur ses « points de vigilance »

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Négociation collective : la CFDT Fonctions publiques alerte Olivier Dussopt sur ses « points de vigilance »(22-06-20)

Prévoir un accord de moyens préalablement à toute ouverture de négociation, respecter les règles de validité des accords majoritaires, engager sans tarder une réflexion sur la mesure de la représentativité, encadrer la possibilité pour les administrations de dénoncer des accords… Dans un courrier adressé le 19 juin 2020 au secrétaire d’État Olivier Dussopt, la CFDT Fonctions publiques attire son attention sur plusieurs « points de vigilance » à l’égard du rapport sur la négociation collective remis fin mai, alors que le projet d’ordonnance sur le sujet sera discuté à partir du 30 juin.

Préparer le terrain sur d’éventuels points durs de la négociation qui doit démarrer le 30 juin sur la négociation collective dans la fonction publique. La CFDT Fonctions publiques a adressé vendredi 19 juin à Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics, un courrier précisant ses positions vis-à-vis du rapport sur le sujet remis fin mai par la mission Esch-Vigouroux-Rouquette.

C’est en effet sur la base de ce rapport que doit être menée la concertation préparatoire à l’élaboration de l’ordonnance sur la négociation collective prévue par la loi de transformation de la fonction publique. Celle-ci a officiellement été ouverte lors d’un premier groupe de travail, le 16 juin. Mais ce dernier ayant été essentiellement consacré à la présentation du rapport aux organisations syndicales, les discussions sur l’ordonnance n’entreront dans le vif du sujet que le 30 juin après quoi le projet de texte sera soumis au CCFP le 23 juillet.

AEF – dépêche 630109 du 22 juin 2020 – Clarisse Jay

LES POINTS DE VIGILANCE

Ce calendrier étant des plus serrés, l’Uffa-CFDT souhaite dès lors faire part au secrétaire d’État « de ses points de vigilance, voire de désaccord, ainsi que de ses propositions », indique sa secrétaire générale, listant certaines des 29 propositions du rapport.

Proposition 5 : « Rendre applicables aux futurs accords les règles de consultation des instances représentatives des agents définies par les lois statutaires applicables à chacune des fonctions publiques. » À ce sujet, la CFDT estime que « l’articulation de la consultation des instances avec le processus de négociation aura vocation à complexifier voire entraver le processus de négociation ». Selon l’organisation, « la représentativité des organisations syndicales suffit et donne la légitimité nécessaire à conclure des accords majoritaires opposables ».

Proposition 13 : « Prévoir que les accords pourront également porter sur les thèmes suivants, qui ne figurent pas dans l’actuel article 8 bis » de la loi statutaire du 13 juillet 1983 (1) : modalités de mise en œuvre des régimes indemnitaires des agents publics ; moyens dévolus aux organisations syndicales ; accompagnement social des mesures de réorganisation des services ; promotion de l’égalité des chances et de la diversité et de la prévention des discriminations dans l’accès aux emplois et la gestion des carrières de la fonction publique ; objet et le cadre juridique de négociations à venir ; conditions de rémunérations et de gestion des contractuels. Pour la CFDT, cette proposition est « nécessaire mais pas suffisante ». Elle estime en effet indispensable de renforcer les moyens (humains, matériels et financiers) des acteurs du dialogue social via un accord de moyen préalable à toute négociation. Et plaide pour un alignement du droit syndical de la fonction publique territoriale sur celui en vigueur dans les deux autres versants.

Proposition 14 : « Confirmer l’exigence selon laquelle un accord est valide s’il est signé par une ou plusieurs organisations syndicales de fonctionnaires ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés en faveur des organisations habilitées à négocier lors des dernières élections professionnelles organisées au niveau auquel l’accord est négocié. » La confédération insiste sur le respect des règles de validité des accords : ils doivent être majoritaires et, dans ce cas, s’appliquer. À l’inverse, ils ne doivent pas s’appliquer. « Il en va de l’enjeu et du défi posé tant aux employeurs publics qu’au syndicalisme », commente Mylène Jacquot dans son courrier.

Proposition 20 : « Encourager la mise en place de comités de suivi de l’accord et laisser aux parties à l’accord le soin d’en définir la composition. » L’organisation syndicale souhaite que « chaque accord fasse l’objet d’un suivi dans le cadre d’un comité réservé aux seuls signataires dudit accord ». La participation ou non des non-signataires aux comités de suivi des accords a de fait été un sujet de débat ces dernières années.

Propositions 23 et 24 : ces propositions prévoient que l’administration peut d’une part dénoncer ou suspendre un accord et d’autre part le modifier par « acte unilatéral » après sa dénonciation, totale ou partielle. La CFDT prévient qu’elle « regardera ce point avec la plus grande attention », et souhaite voir « encadrée et strictement définie » la possibilité de dénoncer un accord et s’interroge sur le recours à la décision unilatérale. Par ailleurs, dans le cas où cette possibilité de dénonciation venait à être retenue, elle revendique d’ores et déjà « qu’elle soit ouverte à l’ensemble des parties » (donc également les organisations syndicales) et « qu’elle s’accompagne de dispositifs similaires à ceux en vigueur dans le secteur privé : maintien des dispositions négociées en vigueur jusqu’à l’entrée en vigueur d’un accord de substitution, garanties en cas d’absence d’accord de substitution… ».

Propositions 26 à 28 : ces propositions prévoient l’obligation de négocier pour certains sujets, l’accompagnement de la mise en place de cas de négociation obligatoire par une suspension légale ou volontaire temporaire du pouvoir de décision unilatérale de l’employeur, le droit d’initiative syndical pour provoquer l’ouverture d’une négociation en cas de carence de l’employeur, et l’instauration par la loi dans le droit de la fonction publique le principe d’une obligation de loyauté. La CFDT se dit favorable à l’obligation de négocier, « particulièrement en cas de réorganisation/restructuration/transformation ». Elle juge même utile de rendre « obligatoires et périodiques » les négociations « sur certains sujets en particulier (régimes indemnitaires, égalité professionnelle, action sociale, temps et organisation du travail, vie au travail).

Chapitre 2.2.4 : il porte sur les lignes directrices de gestion. À ce sujet, la confédération réitère sa revendication de voir les LDG faire l’objet d’une négociation, « ou à défaut, d’une concertation obligatoire avant d’être soumises à l’avis du comité social ».

(1) cet article, tel que complété par l’article 1er de la loi de rénovation du dialogue social dans la fonction publique de 2010, définit les champs ouverts à la négociation au niveau national (négociation sur les rémunérations et pouvoir d’achat des agents publics).