Jours de carence : le RN veut faire payer encore plus les fonctionnaires qui sont malades !

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Le Rassemblement National (RN) a remis sur la table une vieille antienne : aligner le secteur public sur le privé en portant de 1 à 3 jours le délai de carence en cas d’arrêt maladie des fonctionnaires. Jean-Philippe Tanguy, député RN, s’est fait le porte-voix de cette mesure, relayant une proposition déjà avancée par Jordan Bardella. Objectif affiché : “équité” entre salariés du public et du privé. Mais quand on regarde les faits de près, le discours du RN ne tient pas.

Fonction publique : déjà des efforts imposés aux agents

Aujourd’hui, dans la fonction publique, un agent malade n’est pas payé le premier jour de son arrêt. Cette règle, instaurée en 2012, supprimée en 2014 puis rétablie en 2018, s’applique à chaque nouvel arrêt (hors prolongations immédiates).
Depuis le 1ᵉʳ mars 2025, les règles se sont encore durcies : les agents ne perçoivent plus 100 % de leur traitement pendant les trois premiers mois de maladie, mais seulement 90 %. En clair, les fonctionnaires perdent déjà du pouvoir d’achat dès le premier jour d’arrêt.
Il faut rappeler que ce durcissement des règles n’est pas une nouveauté : l’ancien ministre de la Fonction publique, Guillaume Kasbarian, défendait déjà en 2024 l’idée d’allonger le délai de carence à trois jours, dans une logique d’“alignement” sur le secteur privé.

Dans le privé : 3 jours… mais souvent compensés

À première vue, le secteur privé semble plus dur, avec 3 jours de carence avant de toucher les indemnités journalières de la Sécurité sociale. Mais il y a un détail majeur que le RN oublie (ou passe sous silence) :
dans les faits, une forte majorité des salariés du privé (près de 70 % selon le Monde) ne sont pas réellement pénalisés, car leurs accords de branche ou d’entreprise prévoient un maintien de salaire intégral dès le premier jour d’arrêt maladie. Ces garanties varient selon les secteurs, la taille des entreprises ou le statut des salariés, mais elles couvrent largement le paysage du privé.
Résultat : beaucoup de salariés du privé n’ont aucune perte de revenus, là où les agents publics, eux, subissent systématiquement une retenue dès le premier jour.

Infographie Le Monde
Une “équité” qui masque une inégalité

Présenter les fonctionnaires comme des “privilégiés” est donc une contre-vérité. En réalité, ce sont eux qui perdent davantage : un jour systématiquement non payé, et depuis mars dernier, une baisse du taux de remplacement.
Allonger ce délai de carence à 3 jours reviendrait à punir doublement les agents publics, alors qu’ils sont déjà plus fragilisés que nombre de salariés du privé.

Derrière l’argument budgétaire, une attaque politique

Le RN justifie sa mesure par la dette publique et des économies “nécessaires”. Mais en réalité, il s’agit d’un choix politique : plutôt que d’investir dans la prévention, la santé au travail et l’amélioration des conditions d’exercice des métiers publics, on préfère pointer du doigt les malades et creuser encore la perte de revenus des fonctionnaires.
À gauche, plusieurs voix rappellent que ces propositions stigmatisent celles et ceux qui font vivre nos services publics. Comme le soulignait récemment la secrétaire nationale d’EELV Marine Tondelier : « si vous travaillez dans la fonction publique et êtes tenté par le vote RN, vous savez désormais que ce parti ne vous défendra jamais ».

En résumé :

Non, les fonctionnaires ne sont pas mieux lotis que les salariés du privé en cas d’arrêt maladie. Bien au contraire. La proposition du RN n’est pas une mesure d’équité : c’est une nouvelle attaque contre les agents publics, qui fragilise encore leurs conditions de travail et leur pouvoir d’achat.

 Public vs Privé : la réalité des jours de carence

Secteur Règle officielle En pratique
Fonction publique 1 jour de carence (non payé) à chaque nouvel arrêt Depuis mars 2025, indemnisation abaissée à 90 % du salaire pendant 3 mois
Secteur privé 3 jours de carence avant indemnités Sécu Près de 70 % des salariés couverts par un accord de branche ou d’entreprise qui maintient 100 % du salaire
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