Semaine de quatre jours : “Dans les fonctions publiques, c’est un sujet qui émerge”

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Concentrer son travail pour se libérer une journée est une promesse séduisante, mais est-ce vraiment la panacée ?

Dossier   » Semaine de quatre jours : mirage ou avancée sociale? « 
par Anne-Sophie Balle, Fabrice Dedieu et Claire Nillus

Article 1 : Un débat (encore) très patronal –  (lundi 09 octobre)
Article 2 : “Dans les fonctions publiques, c’est un sujet qui émerge” (mardi 10 octobre)
Article 3 : Le temps de travail au menu de la rentrée sociale – (mercredi 11 octobre)
Article 4 : La deuxième métropole de France se lance – (jeudi 12 octobre)
Article 5 : Chez Accenture, un premier bilan plutôt positif – (vendredi 13 octobre)

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“Dans les fonctions publiques, c’est un sujet qui émerge”

Fonctionnaire territorial et cofondateur du think tank Le Sens du service public, Johan Theuret pense que la semaine de quatre jours peut être une alternative pour ceux qui n’ont pas la possibilité de télétravailler, à condition que tout soit bien pensé en amont.

Par Fabrice Dedieu


Johan Theuret  – (© Fabien Calcavechia)

La semaine de quatre jours fait-elle débat dans les fonctions publiques ?

Pour le moment, ce n’est pas une revendication massive des agents ou des employeurs. Toutefois, la semaine de quatre jours est un sujet qui émerge. Les différentes parties veulent creuser le sujet pour voir si c’est pertinent à mettre en place, avec un a priori plutôt favorable. Mais quand on creuse, on se rend compte des difficultés et des risques. Dans la métropole rennaise (pour laquelle je travaille), par exemple, nous avons accepté d’étudier le sujet dans un secteur : nous sommes en pleine phase de réflexion avec les agents. Et ça soulève beaucoup de questions : comment réorganiser le travail, est-ce que c’est applicable à tous ou faut-il le réserver à une certaine catégorie d’agents… ?

Justement, est-ce que la semaine de quatre jours peut se mettre en place dans toutes les administrations ?

Ce serait très compliqué. Cela demande une telle finesse dans la mise en place qu’il vaut peut-être mieux une approche par métier plutôt que globale, et notamment cibler les agents qui ne peuvent pas télétravailler. Un sondage sur le télétravail réalisé par Le Sens du service public révèle que, pour plus des trois quarts des répondants, la semaine de quatre jours serait une bonne compensation pour ceux qui ne peuvent télétravailler. Je ne dis pas qu’il faut réserver les quatre jours aux seuls agents qui ne télétravaillent pas, mais je pense qu’il faut d’abord penser à eux, afin d’éviter des ressentis inégalitaires.

“Pour certains métiers, ce sera compliqué, et pas forcément intéressant ni nécessaire […]“

Par ailleurs, la semaine de quatre jours ne peut être imposée. Il faut que les agents soient partie prenante et volontaires, car ce sont de nouvelles contraintes qui ne sont pas négligeables. Ce sont quand même sept heures de travail à répartir sur quatre jours. Pour certains métiers, ce sera compliqué, et pas forcément intéressant ni nécessaire, que les agents travaillent d’aussi longues journées. Je pense notamment à certains métiers techniques ou aux agents spécialisés des écoles maternelles. Avec un jour en moins, leur volume horaire quotidien ne collerait plus avec les horaires de fonctionnement des écoles.

Est-ce que cette organisation du travail pourrait dégrader la qualité des services publics ?

Si la semaine de quatre jours a un effet sur la qualité du service public, il ne doit être que positif, en rendant les emplois plus attractifs, par exemple. Mais en aucun cas ça ne doit dégrader le service rendu. Ce serait difficilement concevable de passer les agents à quatre jours et de fermer le service le cinquième jour de la semaine.

Dès lors, comment concilier une semaine de quatre jours avec des services ouverts au public cinq jours par semaine ?

Recruter pourrait être une réponse mais, dans le contexte actuel, ça ne l’est pas. Je ne dis pas que des embauches à la marge sont impossibles mais des embauches massives, ça me semble inenvisageable. Et puis nous n’allons pas recruter juste pour une journée, le but n’est pas de créer de la précarité. C’est pourquoi la mise en place de la semaine de quatre jours nécessite des réflexions sur l’organisation du travail.

Fabrice Dedieu – Journaliste

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