SGCD : Évaluation de l’organisation et du fonctionnement des secrétariats généraux communs de département (SGCD)

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Deux ans après la création effective des secrétariats généraux communs départementaux (SGCD), au sein desquels ont été regroupées et mutualisées les fonctions support des préfectures et des directions départementales interministérielles (DDI), une mission inter-inspections diligentée dans le cadre du comité de pilotage des DDI (26 juillet 2022) a procédé à l’évaluation de leur organisation et de leur fonctionnement.

Vous trouverez, ci-dessous, la synthèse du rapport établi à la suite de cette mission et les recommandations qui en découlent.

Le rapport est complété de sept annexes, présentées en tome 2, et assorti de documents remis à la mission par les services, groupements professionnels et organisations syndicales (dont la CFDT), joints en tome 3.

Outre le rapport, ses annexes, les pièces jointes, le plan d’actions pour un SGCD au service de l’administration territoriale de l’Etat (ATE), vous trouverez également les articles consacrés aux interventions de la CFDT sur les dysfonctionnements des SGCD depuis leur création. En fin d’article, une vidéo de 2 minutes par Acteurs Publics, traite de ce sujet.

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La mission constate que « l‘objectif premier de la réforme n’est pas atteint ». Son rapport met en évidence d’importants dysfonctionnements constatés depuis la mise en place des SGCD (« incidents de paye, interruptions d’activité liées à des ruptures d’accès informatiques, dégradations durables de conditions de travail en l’absence de dépannage, préjudices causés aux usagers ou aux fournisseurs en l’absence d’accueil ou suite à l’allongement des délais de paiement … »). La mission a aussi constaté « une stagnation voire un recul marqué de la performance des fonctions support … » ou bien encore « la réforme a bouleversé le fonctionnement de l’administration territoriale de l’État et le quotidien de travail de ses 50000 agents … ».

En 2021 et 2022, quand nous remontions ces problèmes, il nous était souvent répondu qu’il fallait « laisser du temps au temps » pour que ce service prenne ses marques, or nous constatons que presque 3 ans après, les symptômes sont toujours là, que les personnels travaillant dans les SGCD sont souvent en souffrance, que les agents qui sollicitent le service n’ont souvent pas les réponses attendues.

Nous notons aussi des problèmes de pilotage des SGCD – que nous dénoncions déjà – suivant comment les préfets considèrent les SGCD. Cela est même écrit dans la note du « groupement des SGCD » (Tome 3 – pièce jointe n°1) : « Le pilotage local du SGCD : il reste problématique malgré nos différentes alertes et malgré les consignes émanant du niveau national. Nous avions alerté sur le fait que dans de nombreux départements, le pilotage, pour ne pas dire le management des SGCD, était transféré au secrétaire général de préfecture, avec un regard du préfet, qui parfois le porte à considérer que le SGCD reste un service de la préfecture, voire à s’en désintéresser, ce qui n’est pas sans lien avec les relations parfois difficiles avec les entités bénéficiaires. Par ailleurs, la notion d’autorité fonctionnelle, partagée entre SG de préfecture et directeurs de DDI, nous met en réelle difficulté et nous place depuis le départ dans un rapport de subordination qui nous fragilise, nous laisse trop peu de marges de manœuvre et réduit nos capacités de décision, voire, parfois, a pour effet de remettre en question notre autorité, notre engagement, notre légitimité et notre bien être. »

Cela était déjà noté dans le rapport sénatorial de juin 2022 d’Isabelle BRIQUET.

Il faut espérer que la 3ème recommandation prioritaire (voir plus bas) du nouveau rapport de la mission inter-inspections, soit suivie d’effets !

L’ensemble des organisations syndicales avait demandé le report de la mise en place des SGCD à la sortie de plusieurs mois de confinement « Covid 19 ». Et comme d’habitude, l’exécutif a maintenu ses positions : la réforme ! la réforme !  … vite ! vite ! … et quand on persiste dans l’erreur …
De réformes mal fichues en réformes mal foutues, c’est la dégradation du service rendu au public qui s’accentue.

La composition du dossier :

Tome 1 – Rapport

    • Synthèse du rapport
    • Table des recommandations prioritaires
    • Liste des recommandations par ordre d’apparitions dans le rapport
    • Introduction
    • Rapport

Tome 2 – Annexes :

    • Annexe 1 – Liste des personnes rencontrées
    • Annexe 2 – Éléments recueillis par un questionnaire de la mission
    • Annexe 3 – Situation spécifique de l’Ile-de-France
    • Annexe 4 – Situation spécifique de la Guyane
    • Annexe 5 – Situation des effectifs en SGCD
    • Annexe 6 – Suivi commenté des chantiers de convergence
    • Annexe 7 – Situation des systèmes d’information

Tome 3 – Pièces jointes :

    • Pièce jointe n°1 – Note du groupement des SGCD
    • Pièce jointe n°2 – Résultats enquêtes SGCD auprès des DDT(M) Déc 2022
    • Pièce jointe n°3 – Documents remis par les OS des SGC outre-mer
    • Pièce jointe n°4 – Documents transmis par les OS des SGCD
    • Pièce jointe n°5 – Note de DAC Guadeloupe

Plan d’action pour un SGCD au service de l’administration territoriale de l’Etat (Post rapport MII)

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Synthèse du rapport :

Deux ans après la création effective des secrétariats généraux communs départementaux (SGCD), au sein desquels ont été regroupées et mutualisées les fonctions support des préfectures et des directions départementales interministérielles (DDI), une mission inter-inspections diligentée dans le cadre du comité de pilotage des DDI a procédé à l’évaluation de leur organisation et de leur fonctionnement.

Composée des cinq inspections ministérielles de l’administration territoriale de l’État (ATE) et coordonnée par l’IGA (Inspection Générale de l’Administration), la mission a entendu l’ensemble des administrations centrales concernées et rencontré les services déconcentrés de 25 départements, dans l’hexagone et outre-mer, soit près de 600 interlocuteurs. Elle a par ailleurs ouvert un questionnaire national auprès des SGCD qui a recueilli un taux de réponse de 88%.

Sur la base d’un diagnostic nourri, la mission constate que l’objectif premier de la réforme n’est pas atteint. A rebours de l’ambition initiale, l’ensemble des acteurs indiquent avoir vécu une dégradation de la qualité de service, corroborée par d’importants dysfonctionnements (incidents de paye, interruptions d’activité liées à des ruptures d’accès informatiques, dégradations durables de conditions de travail en l’absence de dépannage, préjudices causés aux usagers ou aux fournisseurs en l’absence d’accueil ou suite à l’allongement des délais de paiement …), même s’ ils notent une amélioration progressive. Les indicateurs ministériels existants confirment une stagnation voire un recul marqué de la performance des fonctions support (notamment, l’allongement des délais d’intervention), en dépit de progrès enregistrés en matière budgétaire et immobilière.

De fait, la réforme a bouleversé le fonctionnement de l’administration territoriale de l’État et le quotidien de travail de ses 50000 agents, avec une fonction de soutien désormais externe aux services soutenus et confrontée à un changement d’échelle conséquent en nombre d’agents et de sites. Si les SGCD ont été effectivement constitués sur l’ensemble des territoires, leur déploiement n’a toutefois été précédé d’aucune expérimentation mais a été opéré selon un calendrier rapide, en pleine crise sanitaire et parallèlement à la création de nouvelles directions départementales de l’emploi, du travail et des solidarités. La mise en place des SGCD n’a par ailleurs pas été préparée par l’avancement suffisant de chantiers de convergence dans les domaines sensibles des ressources humaines et des systèmes d’information. Ni la conduite d’une préfiguration dans chaque département, ni la signature de contrats de service négociés au plan local, ni l’élaboration de macroprocessus menée au niveau central n’ont permis de compenser ces difficultés d’origine. Le plan d’action déployé fin 2021 n’a pas produit tous les effets correctifs attendus.

Dans ce contexte, la dynamique de professionnalisation des équipes en SGCD s’est rapidement heurtée à des obstacles importants. Le manque d’effectifs à la création des services – consécutif, d’une part, à la vacance initiale d’un tiers des postes transférés depuis les DDI, et, d’autre part, à la diminution préalable des effectifs dans les services support des préfectures (-19% l’année précédant la réforme) – n’a été surmonté que progressivement. Il se double d’une attrition progressive des compétences issues de la sphère DDI, d’un déficit important d’attractivité et d’un turn-over croissant qui limitent l’efficacité des SGCD, lesquels pâtissent par ailleurs de leur éclatement sur plusieurs sites (seule la moitié d’entre eux sont intégralement regroupés, à date). De nombreux report s de charge ont ainsi été occasionnés vers les services soutenus et notamment leurs directeurs.

Les mutualisations ad hoc opérées dans quelques territoires au niveau régional (Ile-de-France et PACA) n’ont pas convaincu la mission de leur efficacité et ne semblent devoir être ni étendues ni généralisées. Outre-mer, la mission considère que la réussite de la réforme passe par une révision de l’organisation et du périmètre des SGC associant l’ensemble des ministères de l’ATE (y compris le ministère de la culture), par l’identification et l’analyse des difficultés qui se posent et par la mise en place d’un plan ultra-marin adapté à la situation de chaque territoire. Une initiative spécifique devrait être prise de manière urgente pour la Guyane dont la situation apparaît particulièrement préoccupante.

Dans ces conditions, l’objectif d’efficience porté par la réforme, visant à permettre un redéploiement d’effectifs des services support vers les services métier, n’est pas atteint : les effectifs en SGCD n’ont cessé d’augmenter depuis deux ans et excèdent aujourd’hui la dotation initiale de plus de 10%, à plus de 7000 ETP. Par ailleurs, aucune économie substantielle de fonctionnement n’a encore été enregistrée, y compris s’agissant des dépenses liées aux bâtiments et en dépit de l’effort sans précédent de regroupement immobilier porté avec succès par les SGCD.

En dépit de ces difficultés majeures, la mission considère que toute nouvelle réforme – y compris celle d’un retour en arrière – doit être proscrite, compte tenu des risques qu’elle ferait porter sur les structures – incessamment réformées depuis quinze ans – comme sur les personnels. A cet égard, la mission appelle l’attention sur le niveau d’épuisement des équipes en SGCD, où l’absentéisme et le turn-over augmentent. La moitié des départements sont concernés par au moins une situation de risque psycho-social en SGCD.

A court terme, la mission préconise de clarifier rapidement les éléments de structuration indispensables à l’exercice quotidien des missions en SGCD et en priorité de :

  • stabiliser le périmètre d’intervention de ces services, sur-mobilisés au risque de la dispersion compte tenu des possibilités d’extension dévolues au niveau local, en clarifiant leurs modalités concrètes d’ intervention ;
  • ajuster la répartition des effectifs en SGCD, qui affichent aujourd’hui une hétérogénéité majeure, avec un rapport allant de 1 à 10 entre départements pour des missions relativement standardisées, en bâtissant un référentiel d’allocation sur la base de ratios de soutien pour chacune des missions socle (RH, numérique, achats/budget, immobilier/logistique) ;
  • généraliser la présence de référents de proximité dans tous les services soutenus et réorienter leur activité vers l’appui au pilotage, en développant parallèlement d’autres mesures permettant de garantir la proximité indispensable entre le SGCD et les agents soutenus.

A plus long terme, la réussite de la réforme reposera sur la capacité à réunir les conditions d’une organisation plus efficace et à développer des facteurs d’efficience, ce qui suppose :

  • en premier lieu, de simplifier au maximum les procédures et les outils de travail, pour améliorer la qualité du service rendu et permettre la polyvalence des agents; les chantiers de convergence doivent être priorisés au regard de leur impact sur le travail en SGCD, en faisant d’abord porter l’effort sur l’harmonisation des dispositifs transversaux en matière de ressources humaines et sur le développement des passerelles entre les systèmes d’information ;
  • parallèlement, d’orienter le pilotage des services vers la qualité, en généralisant le recueil de la satisfaction utilisateurs, en rendant plus opérationnels les contrats de service et en développant la démarche interne de projet de service ; ces orientations doivent être accompagnées par les SGAR, avec les directions régionales, et continuer d’être portées au niveau central par un pilote unique qu’est la DMATES au ministère de l’intérieur, bien identifiée du réseau et des acteurs interministériels, tant que la réforme n’aura pas atteint la maturité suffisante permettant un suivi de droit commun ;
  • enfin, de tirer toutes les conséquences du décret instituant les SGCD en renforçant leur dimension interministérielle : la mission estime nécessaire qu’un cadre unique de gouvernance soit fixé pour l’ensemble des SGCD, qui garantisse l’implication du préfet et la collégialité indispensable à leur bon fonctionnement. Elle estime par ailleurs essentiel que leur caractère interministériel soit consacré par la qualification des postes de directeurs en emplois DATE – qui relèvent de la gestion interministérielle et renforceront l’attractivité de ces fonctions -, par l’installation d’instances de dialogue social qui leur soient dédiées – pour assurer un suivi dédié en matière de santé et sécurité au travail – , par l’identification de leurs effectifs au sein d’une sous-action dédiée du P354 – qui permette d’en mesurer l’efficience, en cohérence avec les ambitions initiales de la réforme et afin de favoriser sa réussite .
Les recommandations :

Table des recommandations prioritaires :

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Liste des recommandations par ordre d’apparition dans le rapport

Vidéo sur le sujet par Acteurs Publics :

Le sujet « SGCD » est traité à partir de 4mn30 jusqu’à 6mn35

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Pour mémoire :

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